LA SOUPE AU FLOU

On n’arrive plus à suivre, on n’y comprend plus grand chose. Télé, radio, journaux, Internet et ses blogueurs, vrais faux sites d’infos, fake, intox… Les volumes de « communication » sur les restaurants et les chefs suivent une courbe qui ne cesse d’être exponentielle. Avec les yeux de l’optimisme « tout est bon dans le cochon » pour glaner l’information. Mais quelle information? Le brouillard est tombé avec l’arrivée en force dans la danse de la « communication » des réseaux sociaux, spécialistes de l’ambigüité entre information et publicité. Meta en tête bien sûr, c’est-à-dire Facebook et Instagram. Le géant polymorphe Google est entré en force dans le jeu des sites de contributions dominé jusqu’alors par TripAdvisor dont la société-mère est américaine. Comme les disparus Cityvox ou Linternaute avant lui (vous vous souvenez?) ce site n’est que la vitrine d’un gigantesque ordinateur fonctionnant grâce aux avis des contributeurs, et notamment aussi grâce au financement des restaurateurs qui passent à la caisse pour être avantagés dans leur classement. Des informaticiens et des comptables. Et des avocats: TripAdvisor a été condamné en 2014 pour avoir mis de faux-avis sur son site en faisant croire qu’il s’agissait de vrais: « Des informations trompeuses sur la source des commentaires »*. Les sites de réservations comme TheFork propriété de TripAdvisor acoquiné dans un partenariat avec le fameux Guide Rouge Michelin en décembre 2019, pataugent aussi dans la soupe au flou! Avec notamment leurs scandaleuses promotions du restaurant par une politique de la remise, du rabais. Comment faire une remise de 50% sur un menu? Suffit de multiplier par deux le prix initial, juste avant. Je vous assure que ça passe comme une lettre à la poste. Le fautif doublé d’un dindon de la farce est le consommateur consentant acheteur de balivernes et fausses remises, qui a envie de croire à l’aubaine… et qui ne comprend pas toujours ce qu’il mange. Et puis en France en particulier, on adore cette obsession du classement qui commence à l’école, du Michelin à TripAdvisor et des guides en général, de la hiérarchie indiscutable de fait. Ça rassure, on aime les bibles et les dictionnaires qui disent la vérité. De notre côté au Bouche à Oreille, on s’interdit de hiérarchiser les restaurants, nous préférons les catégoriser. Car qui peut dire qu’une pizza est mieux que des pieds-paquets? Qu’une salade d’artichauts est mieux qu’un tajine de homard mitonné aux épices de Guyane et saveurs de truffe flambées à l’Armagnac? Si vous y arrivez, faites-moi signe.

Olivier Gros

* https://www.challenges.fr/afp/faux-commentaires-l-italie-inflige-500-000-euros-d-amende-a-tripadvisor_126773