L'OS ET L'ARÊTE du Bouche à Oreille n°53 Jan 2005

LOI DU 29 JUILLET 1881

OU LA SURCHARGE PONDERALE DU POIVRON

Les présentations n’ont pas été faites. Excusez-nous ! d’où votre courroux monsieur Cyril Aussenac ! on peut le comprendre. Ça ne se fait pas de porter un avis sur une personne qu’on ne connaît ni des lèvres ni d’Adam. Vous attaquez donc bille en tête par lettre recommandée, « vous m’avez insulté et diffamé ». Première nouvelle ! On s’empresse donc de relire le texte récriminé avec une loupe et on cherche, on cherche l’insulte, voire la diffamation. On n’y voit que du bleu, pas la moindre allusion qu’on pourrait apparenter à de la diffamation. Encore moins à de l’insulte. C’est pas le genre de la maison. D’accord, on ne classe pas les frites parmi les meilleures de l’année, on ne rend pas hommage à l’entrée qu’on a oublié d’assaisonner, d’ailleurs c’est peut-être mieux ainsi, on s’en prend avec ironie au côté amateur des acteurs mais si on ne peut plus dire les choses telles qu’on les voit, vaut mieux remballer les outils et manger à la maison comme ça on peut critiquer sa femme sans la pénible contrainte et labeur assommant de l’écrire. Bref, on a sorti la loupe à dénicher le détail, celui qui tue et qu’on ne voit pas à l’oeil nu. Et on n’a rien vu ! même pas un zéro à la clef ! On charrie bien un peu la surcharge pondérale du poivron, je vous l’accorde, mais y a pas de quoi en faire un drame ! on s’attaque à la salade de fruits qui s’applique à ne pas être fraîche, qui a vieilli dans une boite en pleine saison des fruits. C’est un banal constat plus qu’une diffamation. Notre métier est une suite de constats, on n’y peut rien. Bon, j’arrête là car tout le texte est basé sur les prestations du Sud et uniquement sur les prestations. D’accord, avec notre style bien particulier mais à l’heure qu’il est, en France selon la loi sur la liberté de la presse, il n’est pas interdit de critiquer les prestations, toutefois sans mots orduriers, infamants et insultants. Vous avez beau sortir comme une menace la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse, chapitre IV, paragraphe 3, article 9 du code pénal pour demander des réparations immédiates au risque si on n’obtempère pas de s’exposer à une procédure par voie judiciaire, on n’en démord pas, vous êtes un restaurant plus que moyen.

LA MENACE, TOUJOURS LA MENACE !

S’il faut aller devant un tribunal, on ira, si vous préférez qu’on revienne vous tester, on reviendra mais on ne cède pas sous la menace. On ne se renie pas à la moindre menace. Et quand vous écrivez qu’on n’est pas venu dans votre restaurant, là on a affaire à de la diffamation et pire une insulte car cela voudrait dire qu’on a tout imaginé et qu’on est des affabulateurs de grand chemin ! vous écrivez encore « vous avez publié (pas de z à la fin monsieur) une infamie sur mon restaurant alors que je ne vous connais pas et que vous ne connaissez pas mon restaurant ». Elle est bien bonne celle là ! Non monsieur, on ne vous connaît pas mais on connaît votre établissement ! Voici l’addition comme pièce à conviction car contrairement à vos assertions mensongères, on teste toutes nos tables, une pratique qu’ignorent tous les grands guides institutionnels.

DE SURPRISE EN SURPRISE

On est allé de surprise en surprise poursuivant votre splendide prose comme au hasard cette phrase : « Lorsqu’on prétend faire de l’information on vérifie ses sources et on ne diffame pas des gens que ne l’on connaît pas ». Pourquoi, lorsqu’on connaît on peut diffamer ? Quelle belle conception de la diffamation ! et encore, comme une apothéose du ridicule cette conclusion qui donne un aperçu de ce que devrait être un guide sérieux à ses yeux: « J’ai 23 ans (voilà une qualité irréfutable), j’ai créé ce restaurant l’an dernier, (bon anniversaire), je subis des privations terribles, (une bonne raison pour ne pas dire ce qu’on pense de vous) pour amener mon restaurant au plus haut dans la qualité (y a encore du chemin à faire). Je ne vais pas supporter que des gens que je connais pas, (encore ! depuis le temps, on commence à se connaître !) détruisent ma réputation (pourquoi, vous vous êtes déjà fait une réputation ? on n’était pas au courant !) en publiant des ragots d’un certainement abruti, (ah ! là, vous franchissez la ligne jaune ! abruti est une véritable insulte ! nous, on n’aurait pas osé !) et le contraire de ce qu’est mon restaurant. Si vous ne faites pas le nécessaire immédiatement, (c’est quoi le nécessaire ?) j’adresserai votre article à tous mes clients, (les pauvres, ils ne connaissent pas l’article du 29 Juillet 1881!) à mes fournisseurs, (eux ils s’en tapent encore plus de l’article !) ainsi qu’aux syndicats compétents. (compétent compétent, comme vous y allez vous alors !) signé Cyril Aussenac. Y a des littérateurs dans les restaurants qui se baladent comme ça avec l’article du 29 juillet 1881 sous le bras. Et qui ont cette manie spécifique aux restaurateurs, ils font écrire aux guides comme si c’était eux qui faisaient le guide ou qu’ils avaient une quelconque influence sur les guides. Nous, pour ce qui concerne le sud, on a eu notre quota de lettres mais envoyé directement par le sud. Tout comme si c’était le facteur. Bizarre non !
LE SUD 50 bd Jean Mermoz 13700-MARIGNANE Tél. 04.42.09.26.17

Paul Bianco