L'OS ET L'ARÊTE du Bouche à Oreille n°47 Oct 2003

HOLIDAY OFF

L’heure tournait et il commençait à se faire tard. A ma montre tout indiquait qu’il était plus de treize heures. Dans la réalité tout indiquait que j’étais bien sur le port de Saint-Laurent. Et je tournais, je tournais pour trouver une place. Pas la moindre place, même en stationnement à PV. Rien ! Comme j’avais décidé de tester le restaurant d' »Holyday inn », j’ai eu cette lumineuse idée d’aller à la réception demander si par hasard, il n’avait pas un parking privé, histoire de déjeuner tranquille chez eux. Le réceptionniste, un brin méprisant, me répond qu’il tient à ma disposition un ticket de dix euros qui me donne droit à 24h de stationnement dans le parking souterrain d’Atol beach. »Y a pas moins cher ? » que je demande un brin penaud. « Deux heures me suffirait », rajoutais-je. Cette fois l’air agacé, le réceptionniste me fit comprendre en langage codé mais stylé que c’était à prendre ou à laisser. « je prends » dis-je à contrecoeur car l’heure tournait, tournait et moi je tournais du coeur. Arrivé devant le portail métallique, cent mètres plus loin, je glisse mon ticket à 10 ? dans la fente pour avoir droit au sésame qui s’ouvre ainsi que mon angoisse. Car il faut bien l’avouer, je suis claustrophobe. Entre autre ! Et quand j’ai vu le portail métallique se refermer derrière moi, j’ai ressenti comme une grosse panique. Mais je savais pas tout. L’escalier pour piétons qui mène à l’air libre et la lumière était condamné. Obligation de prendre l’ascenseur. Or je ne prends jamais d’ascenseur. Avec toutes ces pannes d’électricité ! L’Italie entière en a fait la triste expérience ! Itou Chicago ! A la seule idée de rester enfermé dans une cage me remplit d’effroi. Je suis resté une éternité à attendre qu’une voiture sorte pour m’échapper. Finalement, un locataire de l’immeuble m’a ouvert. Mes cent mètres vers le lieu de ma quête m’ont paru très longs. C’était ma route de Compostelle avec une hypoglycémie en prime. Arrivé à la réception, j’apprends avec stupeur que le restaurant ne fonctionne pas ; c’est juste pour les petits-déjeuners de l’hôtel. Faut courir sur la plage au « Calypso », restaurant officiel de l’hôtel. Je n’ai rien contre mais il suffit d’avertir. Je n’aurais pas pris. Abasourdi mais incapable de lâcher ma petite crise colérique dont je suis coutumier. Trop fatigué par mon hypo. Je file donc au « Calypso », encore 100 mètres plus loin, que j’avais déjà testé. Autre route de Compostelle, comme pour tester ma foi en mon métier. Le repas moyen terminé, je repars l’angoisse d’être obligé de reprendre l’ascenseur. Et pour faire plus vrai, il ne marchait pas. Ou plus exactement, je n’arrivais pas à le faire fonctionner avec mon ticket malgré les instructions suivies à la lettre. Mais là, je m’abstiendrai de jeter la pierre car les instructions chez moi c’est un peu comme du chinois mélangé à de l’hébreu. Reparti devant la porte en ferraille dans l’espoir de voir une voiture sortir. Une heure durant pas une seule sortie. A quoi occupaient-ils leur temps tous ces gens ! Dieu seul le sait. Las d’attendre je me retape mes cent mètres pour causer avec le réceptionniste ! Dès fois qu’il ait à me proposer un passage direct à partir de chez eux ou me préciser là où ça coince. Toujours aussi méprisant, le préposé aux réclamations me fait comprendre avec la courtoisie due à sa fonction que je suis un gros naze et qu’il faut bien lire les instructions, la carte faut la glisser dans la fente, la descendre puis la remonter. Faut bien lire, sacré diou ! Refait mes cent mètres en sens retour. Bien relu les instructions et n’ai pas vu qu’il fallait remonter le ticket. En désespoir de cause je m’essaie à un aller-retour. Rien. Pas d’ascenseur qui s’ouvre. Retourne devant la porte de prison dans l’espoir de la voir s’ouvrir. Encore une bonne heure avant de voir deux piétons sortir. J’étais sauvé ! Arrivé à ma voiture, je vois la ferraille se refermer et ma vitre côté conducteur ouverte. Heureusement rien de volé. Tous ces gens ne sortent pas souvent mais ils ne chapardent pas. Mais j’étais enfin dans le « in » d’Hallyday ! Parce que jusqu’à ce moment, j’étais bien dans le off !

Duchmul