L'OS ET L'ARÊTE du Bouche à Oreille n°66 Juin 2008

GANTIÉ: ABUS DE MÉDIOCRE POSITION DOMINANTE

Le propre des « bien-assis » dans un fauteuil en cuir qui gravitent dans l’univers journalistique est d’avoir un avis sur tout, de l’écrire ou de le dire. Et comme les grands chefs indiens: de faire prendre leurs plumes pour vérité sacrée! Dire tout et son contraire sans jamais être contraint de rendre des comptes. Jacques Gantié profite pleinement de sa position dans Nice Matin pour causer économie, gastronomie, cinéma, nécrologie aussi, faits divers bien sûr, toujours une opinion présentée comme évidence, vérité assourdissante.

UN ÊTRE SUPERIEUR

Sortons un moment du registre gastronomique pour écarquiller les yeux en lisant Gantié qui s’interroge sur cette question existentielle: « mais pourquoi courez-vous voir les Chti..? »* notre grand reporter de l’introspection en charge ce jour des questions de sociologie et de comportementalisme apporte un premier élément de réponse « le suivisme, cet effet Parnuge qui frappe le cinéma… » . Nice Matin ne propose pas encore des images en couleurs, sinon on verrait la moue dédaigneuse de notre fin analyste qui songe à tous ces pauvres achetant le journal dans lequel il daigne poser sa prose. Car grand dieu! L’effet Panurge ne touche jamais les journalistes… ni les grands guides gastronomiques! C’est bien connu! Ce sont des êtres supérieurs! A bien y regarder et à lire entre les lignes, Gantié n’hésite pas à faire promo du miche comme nombre de ses coreligionnaires de la prose gastro! Amis (ou pas) lecteurs, si vous dites qu’il s’agit de l’effet Panurge, vous voyez décidément le mal partout.

VENONS-EN AU FAIT!

Car voilà: la bible rouge bénéficie d’une pleine page le dimanche 30 Mars 2008 dans Nice Matin. Dans son introduction, Gantié ne prend pas des pincettes, y va franco de l’hagiographie volontiers touchante pour présenter le nouveau patron du miche: « il est celui qui a rajeuni le guide Michelin…hier l’institution était une affaire franco française…aujourd’hui l’heure est à la diversification et à la présence sur les grands marchés du monde…enfin, une couleur à ne jamais oublier, le rouge, un rouge impérial ». Question léchage de Berlutti, on a rarement fait mieux sous la dictature du pavé rouge. Sous couvert d’objectivité informative, notre zélé serviteur des causes perdues ne cesse à chacune de ses interventions de faire l’apologie de l’élite à laquelle il se doit d’appartenir. En caressant le miche dans le sens des pages, il se regarde dans un miroir. Quitte à s’extasier devant Michelin, on aurait bien aimer qu’il cause des licenciements du fabricant de pneus! Et hop! Gantié accorde une pleine page à des ouvriers licenciés par Michelin sur le site des villes de Poitiers (111), de Bourges (365) ou encore de Toul (826)! Malgré une hausse des profits de 58,2 % (Juillet 2007). Quand on est multi-casquette-journaliste, on l’est jusqu’au bout non? Le BàO possède une info de dernière minute: Jacques Gantié aurait promis au chômeur viré de Michelin qui accepte d’être délocalisé au Japon…le guide Rouge « Japon » dédicacé par lui!

Damien


* Nice Matin du 5 avril 2008